Devant le jury composé de :
Résumé des travaux :
L’urgence de restaurer les écosystèmes face au déclin de la biodiversité et des fonctions écologiques associées ont propulsé le ré-ensauvagement sur le devant de la scène scientifique et médiatique. Deux constats ont découlé des recherches récentes, (i) la confusion qui existe entre restauration écologique et ré-ensauvagement et (ii) un intérêt croissant pour le ré-ensauvagement trophique via la réintroduction (voire l’introduction dans le cas de taxon de substitution) d’espèces clés de voûte ou ingénieurs de l’écosystème, tels que les grands herbivores. Ces derniers génèrent un intérêt particulier de par leurs effets directs et indirects sur les écosystèmes via la consommation des plantes, leurs excréments et le piétinement. De plus, leurs populations sauvages ont souffert d’extinctions majeures relatives aux changements climatiques et à la chasse par les humains, produisant des effets cascades et des pertes de fonctions dans les écosystèmes. Cependant, encore peu d’études évaluent les effets de leur retour dans les écosystèmes, sur leur biodiversité et leurs fonctions, et encore moins en comparaison d’actions plus classiques de conservation et de restauration avec l’utilisation d’animaux domestiques (et gérés comme tels).
Le premier chapitre de cette thèse vise à clarifier les objectifs et approches de la restauration écologique et du ré-ensauvagement. Une synthèse de la littérature scientifique a été réalisée, en retraçant leurs origines, en comparant leurs définitions et leurs principes les plus récents, en étudiant leurs points communs et différences dans les approches et les méthodes utilisées pour rétablir les écosystèmes dégradés. Cette synthèse met en lumière la complémentarité spatio-temporelle de ces deux approches, et souligne l’intérêt pour les scientifiques et les gestionnaires d’une prise en compte des résultats et retours d’expériences de ces deux stratégies.
Les recherches effectuées lors des trois autres chapitres visent à apporter des éléments de réponses quant aux effets de l’introduction de grands herbivores gérés ‘comme sauvages’ sur un socio-écosystème herbacé. Il y a une trentaine d’années sur le Causse Méjean (France), des chevaux de Przewalski (Equus ferus przewalskii) ont été introduits en semi-liberté à des fins de conservation de l’espèce, alors éteinte à l’état sauvage. Cette introduction a permis aujourd’hui de comparer ce système de gestion avec les systèmes d’élevages extensifs ovins (Ovis aries) séculaires sur le territoire ou de chevaux domestiques (Equus ferus caballus) implantés plus récemment. Trois sous-questions de recherche ont été posées : quels sont les effets de différents herbivores et de leurs gestions associées (domestique ou ‘comme sauvage’) sur les communautés végétales herbacées (1) via une approche taxonomique et (2) via une approche fonctionnelle ? (3) Quels sont les effets sur les assemblages et les groupes fonctionnels des coléoptères coprophages, ainsi que leurs rôles dans la dégradation de la matière organique fécale ? Nos résultats montrent que l’introduction de chevaux (domestiques ou gérés ‘comme sauvages’) permet de conserver les pools d’espèces composant les communautés végétales et les assemblages de coléoptères coprophages. Cependant, des différences taxonomiques et fonctionnelles plus fines apparaissent. La fonction de dégradation reste notamment plus rapide dans les systèmes d’élevages ovins. Ces distinctions seraient d’une part, liées aux différences physiologiques des animaux (ovin vs équin) et d’autre part, au type de gestion (domestique vs ‘comme sauvage’). En effet, la gestion ‘comme sauvage’ accorde une place différente à l’espace rendu disponible et aux comportements des animaux. Ces résultats démontrent l’importance d’avoir une approche multi-compartiments afin d’évaluer plus globalement ce type de projet, ainsi que de poursuivre ces recherches dans le futur pour distinguer la part des effets de l’aspect social des herbivores gérés ‘comme sauvage’ sur l’écosystème. Mieux appréhender les spécificités apportées par le type d’herbivore ainsi que le type de gestion permettront alors d’affiner les décisions pour la conservation et/ou restauration d’habitats ouverts et semi-ouverts.