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Quand les cernes des arbres révèlent l’âge d’un des plus beaux joyaux naturels du Kazakhstan

Situé dans la chaîne de montagnes du Tien Shan, dans le parc national de Kolsai et classé réserve de biosphère par l’UNESCO, le lac Kaindy offre un paysage aussi mystérieux que spectaculaire, car il est peuplé d’arbres « fantômes ». De ses eaux turquoise, émergent des troncs d’épicéas (Picea schrenkiana) submergés lors de la formation du lac ce qui a toujours suscité l’intérêt des scientifiques et l’émerveillement des visiteurs. Jusqu’à présent, les chercheurs et la population locale attribuaient la formation du lac au tremblement de terre de 1911 qui avait occasionné d’importants dégâts et de nombreux glissements de terrain dans la région.

Cependant, une nouvelle étude menée par des chercheurs de l’IMBE et du CEREGE ont récemment remis en question cette hypothèse,  grâce à des recherches innovantes fondées sur la dendrochronologie. Cette méthode permet de remonter le temps en analysant les cernes de croissance des arbres et de dater ainsi les événements du passé. En comparant les séries de cernes des arbres morts, submergés dans le lac, avec celles des arbres vivants sur les versants environnants, les chercheurs ont ainsi réussi à dater la formation du lac peu après l’automne 1888, identifiant alors un autre responsable : le tremblement de terre de Chilik qui secoua la même région le 11 juillet 1889, soit 22 ans auparavant la date généralement admise.

D’une magnitude de 8,2, ce très grand tremblement de terre a donc produit, par un effet en cascade, une déstabilisation d’un versant, provoquant un glissement de terrain, le barrage de la rivière coulant dans la vallée et la noyade brutale des arbres lors de la formation du lac.

L’étude ne se limite pas à réviser l’histoire de ce paysage emblématique du Kazakhstan. Elle apporte également la confirmation que le lac Kaindy se trouve dans la zone épicentrale du séisme de 1889 et suggère que les ruptures de surface, décrites à proximité, sont très probablement liées à cet événement. En combinant des analyses dendrochronologiques avec des recherches paléosismologiques, ce travail novateur a permis d’améliorer la connaissance des risques sismiques de cette région frappée par plusieurs séismes depuis la fin du XIXe siècle. Il enrichit la connaissance du patrimoine naturel et contribue aux efforts de préservation d’un environnement unique, fragile et menacé.

La chaîne de montagnes du Tien Shan étant toujours active sismiquement, le scénario mis en évidence au Lac Kaindy pourrait se reproduire, avec un enchainement d’aléas naturels, mais cette fois-ci dans des zones fortement urbanisées : un tel effet en cascade serait alors susceptible de produire les plus grandes pertes matérielles et humaines.