Thématiques de recherche

Longtemps considérée comme une boite noire, la diversité microbienne des sols est une source inépuisable de questionnements et d’enjeux scientifiques. Mon projet de recherche est alors axé sur des questions fondamentales et appliquées relatives à l’étude des interactions entre les sols, les plantes et les microorganismes du sol, telles que : Quels sont les indicateurs microbiens de la qualité des sols ? Quelle est la hiérarchie des facteurs de structuration des diversités et fonctions microbiennes ? Quelles sont les réponses microbiennes aux changements globaux ? Comment la biodiversité végétale contrôle la diversité microbienne ? La diversité végétale accroît-elle la résistance microbienne aux stress et perturbations ? Quelles sont les conséquences fonctionnelles et écosystémiques d’une perte de stabilité microbienne ? Comment la résilience microbienne conditionne la restauration des sols et des communautés végétales ? Comment les communautés microbiennes peuvent-elles atténuer les changements climatiques ?...

Mes travaux sont animés par le souhait de produire des connaissances approfondies en écologie des sols, en particulier sur les fonctions microbiennes impliquées dans les cycles de la matière, mais en variant les problématiques (changements climatiques, pratiques agricoles et sylvicoles, artificialisation, écologie forestière, vulnérabilité…), les contextes bioclimatiques (milieux montagnards, boréaux, méditerranéens, continentaux, tropicaux), les écosystèmes (prairies, pelouses, forêts, steppes, maquis, mangroves) et les approches analytiques (fonctionnelles, chimiques, génétiques, biochimiques, biologiques…) sources d’une véritable richesse tant d’un point de vue scientifique qu’humain. Les travaux que je développe depuis mon doctorat s’articulent autour de 3 grands axes complémentaires : 1) l’identification et la hiérarchisation des facteurs structurant ces fonctions, 2) l’évaluation de la stabilité des communautés microbiennes et de leurs activités face aux stress et perturbations des changements globaux, 3) le développement de l’ingénierie écologique pour la valorisation de la biodiversité et la restauration des interactions fonctionnelles entre les microorganismes du sol et la végétation. Ces recherches ont été accomplies par le biais de divers programmes de recherche, collaborations et encadrements d’étudiants en thèse de doctorat ou de master.

Axe 1) Très diversifiés aux plans taxonomique et fonctionnel, les microorganismes constituent l’une des composantes majeures de la qualité des sols et donc de la pérennité des services rendus par les écosystèmes. La diversité microbienne des sols est fortement dépendante d’interactions factorielles complexes qui sont élaborées à l’échelle locale mais qui s’inscrivent nécessairement au sein d’une histoire phylogéographique régionale. Le premier axe de mes travaux se concentre sur l’identification et la hiérarchisation des facteurs biologiques et environnementaux contrôlant, à différentes échelles, les communautés et les activités microbiennes impliquées dans la transformation de la matière organique et le recyclage des nutriments. C’est dans ce contexte que j’ai publié un certain nombre d’articles (voir annexe pour correspondance des codes) mettant en évidence l’incidence sur diverses activités enzymatiques, cataboliques et/ou respiratoires de certaines pratiques agronomiques et sylvicoles, des métabolites secondaires contenus dans les litières de certaines espèces végétales méditerranéennes, des variations de conditions chimiques et climatiques, et de la structuration physique des sols. Dans ces travaux, les différentes mesures d’activités microbiennes (uréases, phénol oxydases, cellulases, phosphatases, ammonification et nitrification nette, fixation potentielle du N, profils cataboliques, activité respiratoire…) ont été généralement complétées par l’analyse de certains traits des espèces végétales (biomasse, surface foliaire, phénologie…) et la caractérisation chimique de la matière organique (Proche et Moyen IR, RMN du 13C…) et des sols (teneurs en C, N, P…) pour dresser des conclusions précises sur le rôle fondamental des microorganismes du sol dans le fonctionnement des écosystèmes et les services qu’ils nous rendent. Mes travaux se focalisent ainsi sur la séquestration du carbone et donc le service de régulation du climat, le recyclage des nutriments et donc le service de production primaire, et la maintenance de la structure du sol.

Axe 2) Parmi les grands enjeux environnementaux planétaires, l’un des plus cruciaux est sans conteste la « crise » que traversent actuellement les écosystèmes soumis à une réduction et une banalisation de leur biodiversité et donc, par la fragilisation des interactions entre le sol, les plantes et les microorganismes, à l’altération des dynamiques écosystémiques actuelles. Le second axe de mes travaux vise à évaluer la vulnérabilité de la qualité des sols aux principaux forçages anthropiques et climatiques des changements globaux. C’est dans ce contexte que j’ai publié plusieurs articles évaluant la réponse des propriétés physico-chimiques des sols, et de la résistance et résilience des communautés et activités microbiennes à l’aridification du climat, au renforcement des stress osmotiques en zone littorale, à l’accroissement de la fréquence d’incendies ou encore à différentes pratiques impliquant une artificialisation des sols.

Axe 3) Le troisième axe de mes travaux s’appuie ainsi sur les connaissances acquises dans les deux premiers pour concevoir et tester des indicateurs de surveillance de la qualité des sols, des techniques de valorisation de la biodiversité et des pratiques adaptées de restauration écologique des écosystèmes dégradés. Au cours de ma thèse, j’ai ainsi évalué la résilience de la diversité et des fonctions microbiennes dans les sols de pistes de ski restaurées par revégétalisation. En contexte méditerranéen insulaire et continental, nous avons mis en évidence respectivement l’intérêt d’un arrachage systématique de l’espèce invasive Carpobrotus edulis pour restaurer les communautés végétales natives et le fonctionnement biologique de sols et l’efficacité d’un amendement en composts pour accroître la résilience biologique des sols incendiés. L’évolution des pools labiles et stables de carbone peut être décisif pour mieux évaluer la résilience des sols. Ainsi nous nous sommes intéressés en développant certains outils spectroscopiques (RMN du 13C et proche infra-rouge) à caractériser et à prédire l’évolution de la qualité de la matière organique lors de procédés de maturation de déchets agricoles (RI8, RI7) ou en conditions naturelles dans des sols dégradés. L’ingénierie écologique dont le principe peut-être de restaurer le vivant par le vivant trouve un développement considérable une thèse (Quentin Lambert) que je co-encadre avec le Pr Armin Bischoff. Nous proposons ici de caractériser les impacts de la construction et de l’exploitation des centrales photovoltaïques sur la végétation et la biodiversité du sol (mésofaune et microbienne) et de tester des méthodes de restauration écologique(transfert de foin, utilisation d’espèces ingénieures) efficaces et durables.